Dans la Justice, il y a toujours une sorte de bataille pour assurer l’équilibre comme les aiguilles de la balance : l’exécution effective des peines et le surpeuplement carcéral. Comment y arriver ? L’Etat cherche la bonne formule pour arriver à désengorger les prisons.
Le ministre de la Justice Ousmane Diagne, qui présidait hier la cérémonie de la Conférence annuelle des chefs de parquet sous le thème : «La redynamisation des bureaux de l’exécution des peines et les solutions à la surpopulation carcérale», est longuement revenu sur le surpeuplement carcéral. Et malgré les efforts consentis pour juguler ce phénomène, des goulots d’étranglement persistent encore. «En dépit des nombreuses réformes législatives et règlementaires entreprises ces dernières années, la problématique de la surpopulation carcérale est devenue un défi structurel et humain, en raison de la survivance d’un certain nombre de lenteurs et de goulots d’étranglement dans le traitement des dossiers», admet le Garde des sceaux. Et pour le ministre de la Justice, c’est une urgence. «Il est tout à fait normal ou impératif même de devoir y apporter les réponses appropriées», annonce-t-il.
La Conférence annuelle des chefs de parquet tenue hier vise à permettre aux acteurs de la Justice de réfléchir sur de profondes mutations du système pénal. De l’avis du Garde des sceaux, «c’est un bon fonctionnement de ce service qui permet effectivement aux décisions de Justice d’être exécutées, et évidemment de permettre à l’administration de la Justice ou service public de la Justice de contribuer de façon substantielle à générer des ressources nécessaires au bon fonctionnement de tous les services».
De l’avis de Yakham Lèye, Directeur général des affaires criminelles et des grâces, «une exécution effective des peines prononcées par les juridictions et une gestion rationnelle de la population carcérale participent à garantir une Justice efficace, humaine et respectueuse des droits fondamentaux». C’est dans ce sens qu’il a salué la volonté affichée par le ministre de la Justice de «bâtir une administration de la Justice performante, capable de participer à l’effort de mobilisation des ressources publiques, mais aussi soucieuse du respect des droits des personnes privées de liberté».
Le département de la Justice s’emploie ainsi à mettre en place des mesures pour désengorger les prisons. «C’est sur ce chantier des mesures correctives et des bonnes pratiques pour un désengorgement progressif des prisons et un recouvrement effectif des condamnations pécuniaires que je vous engage, les représentants du Ministère public», a dit Yakham Lèye.
D’ailleurs, «une mission de suivi-évaluation de son fonctionnement, menée en octobre 2024, a permis de constater les efforts considérables déployés sur le terrain par les acteurs et les résultats obtenus, mais aussi et surtout de noter les difficultés rencontrées en vue d’y apporter des solutions», poursuit-il.
A l’en croire, «une immersion menée dans les juridictions du ressort des cours d’appel de Dakar, Thiès et Kaolack courant novembre et décembre 2024 a permis de s’enquérir de l’état de l’exécution des peines et d’évaluer le niveau de recouvrement des amendes et dépens, illustrant ainsi le rôle important que la Justice pourrait jouer dans le financement du développement».
De même, «à travers l’intensification du recours aux mécanismes d’aménagement des peines, des formations ciblées à l’endroit des magistrats du Parquet comme du siège à Ziguinchor et Kolda, où on note un faible recours aux mesures d’aménagement des peines, ont été organisées afin de sensibiliser davantage les acteurs sur l’impérieuse nécessité de prendre en charge le droit des personnes condamnées de bénéficier des mesures d’aménagement des peines et de participer au désengorgement des établissements pénitentiaires», renseigne-t-il.
D’après toujours le directeur des Affaires criminelles et des grâces, ces initiatives leur ont permis «d’enregistrer une augmentation significative des placements sous surveillance électronique qui sont passés de 278 à 562 entre octobre 2023 et janvier 2025, et un recours aux travaux au bénéfice de la société, témoignant de notre engagement à privilégier des solutions humanistes et efficaces». Pour l’année en cours, des initiatives sont prises pour améliorer la situation. «Dans le cadre de l’élaboration du Plan de travail annuel 2025, l’accent a été mis sur le renforcement des capacités des bureaux d’exécution des peines par le déploiement de nouveaux outils numériques et la standardisation des procédures, mais aussi sur l’amplification des mesures d’aménagement des peines», a-t-il informé.
SN/SHN
L’objectif visé, selon le ministre de la Justice, est «de mettre en place un système pénal capable de garantir la maîtrise de la population carcérale en vue de l’amélioration substantielle des conditions de détention et de renforcer la contribution de la Justice à la couverture des charges publiques».